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lucas ossendrijver • lanvin

Il y a quelque chose d’indéniablement charmant vous concernant. L’homme que vous habillez est également pourvu de charme et peut être de désir…Des silhouettes libérées mais toujours longues et pleines de grace. Comment pourrais-tu définir ces deux termes dans le champ lexical de Lanvin? Merci pour le compliment ! J’aime le mot ‘’Charme” car il porte en lui une certaine qualité humaine et qu’il est en même temps difficile à définir! Parfois les gens disent cela également à propos de mon travail.  Cela tient plus à une perception des choses qu’à une déclaration exagérée et conceptuelle qui vous reste dans en tête. J’adore faire des vêtements. La difficulté est de trouver le bon équilibre entre les choses que nous voudrions porter et ce qui à l’air bien en photo. Je veux faire des vêtements qui sont crédibles et qui suscitent l’envie, tout en étant ouvert aux points de vue et aux possibilités que nous pouvons offrir aux hommes en leur donnant plus de choix.

Justement, en parlant de désir, la collection hiver (FW16-17) est fournie de contours classiques avec un stylisme très relâché qui apporte également des touches sexy. (Etes-vous d’accord ou pas, pourriez-vous élaborer sur la collection avec vos propres mots). Il y a une certaine “aisance” dans la collection hiver, le stylisme est moins complexe. Je tenais vraiment à les laisser s’exprimer. Les habits que nous faisons sont très élaborés, il y a beaucoup de travail en terme de construction et de finitions car j’aime beaucoup l’artisanat. Un défilé peut parfois être un média ingrat car il est difficile d’y apercevoir tous les détails. C’est pour cette raison que je voulais que les gens soient assis près du podium quand les garçons défilaient. Qu’ils puissent presque toucher les habits et qu’ils soient touchés par eux.

A quoi ressemble véritablement l’homme par Lanvin si je devais vous demander de le décrire ? L’homme par Lanvin est un homme qui prend du plaisir à s’habiller! Pas nécessairement victime de la mode parce que nos vêtements ne hurlent pas, ils chuchotent. J’aime l’idée que les vêtements vous confèrent une certaine énergie, ils vous font sentir bien dans votre corps et vous donne de l’assurance, cela dit l’habit ne devrait jamais vous dominer.

Pourriez-vous me raconter vos débuts quand vous avez repris la collection homme chez Lanvin par rapport à aujourd’hui ? Quels ont été les moments les plus importants pour définir votre signature pour cette maison? Quand j’ai débuté il y a 10 ans, Lanvin ne bénéficiait pas d’une image très claire. J’ai eu la chance de pouvoir redéfinir les silhouettes et les codes. Comme il y avait peu de références dans les archives en terme de vêtements pour hommes, j’ai vraiment pu faire table rase. Nous avons développé une identité et des signatures au fur et à mesure des saisons. Les défilés étaient assez petits et intimistes au début, mais avec l’intérêt croissant de la presse et notre succès grandissant, nos défilés se sont également étoffés. Je me rappelle à nos débuts nous avions un petit showroom avec 3 tables dans mon studio, alors qu’aujourd’hui nous avons un grand showroom ailleurs avec 30 tables.
Je dirais qu’il y avait une saison en particulier qui à été déterminante à mes yeux, c’était une de mes préférées : HIVER 2010-11. Nous étions au Palais de Tokyo. L’espace était plus moderne, avec des sols en béton, des éclairages puissants, je sentais également que la collection avait évolué. Je me sentais plus en confiance, nous avions atteint un nouveau palier, tout me semblait mieux défini. C’est à partir de ce moment là que je pense que les gens se sont penchés plus attentivement sur ce que l’on faisait.

10 ans chez Lanvin, c’est un temps assez long au service d’une maison, que vous dirigiez il y a encore peu de temps en binôme avec A. Elbaz, pour reconstruire une réputation dans le luxe. Comment vous sentez-vous maintenant que vous êtes seul aux commandes ? Qu’est ce qui a changé ? J’adore Alber, c’était aussi la raison pour laquelle je suis venu chez Lanvin. C’était une magnifique expérience et un grand plaisir de pouvoir travailler à ses côtés pendant 10 ans. C’est très précieux d’avoir quelqu’un avec qui échanger; on apprend tellement!
Je n’ai pas changé ma façon de travailler et je ne me sens pas très différent d’avant. Je poursuis le travail que j’ai commencé il y a 10 ans avec le même groupe autour de moi. La mode n’est pas une industrie de solitaires, il s’agit de travailler avec des gens et de communiquer ensemble tout le temps. Les changements récents me font juste réfléchir un peu plus à ce que j’aime vraiment dans la mode et pourquoi je veux en faire partie; d’une certaine façon cela m’a permis de me concentrer.

Comment gardez-vous une ligne de conduite à l’opposé de la mode éphémère? J’ai bien une relation du type je t’aime/moi non plus avec la mode. J’adore dessiner des vêtements, tout le processus, l’artisanat, travailler en groupe. C’est vraiment une passion pour moi et je sais que j’ai de la chance. Même si les rythmes ont évolué ces dernières années: plus de collections, de pré-collections. Le danger c’est de ne pas avoir le temps de réfléchir et de pouvoir digérer une idée avant de la mettre en avant. Il y a tellement plus de choses disponibles, tellement de choses sans réelle valeur. A t-on vraiment besoin de tous ces vêtements? Parfois je me demande!! La seule réponse que je peux apporter à cette question, tient à la valeur que nous accordons aux vêtements, savoir comment il sont faits, leur qualité, ce qu’ils peuvent apporter à la personne qui les porte. C’est la différence avec la mode éphémère où tout est copié et jetable. Qu’en est-il d’avoir juste de beaux habits?

Y a t-il une méthodologie ou un cadre philosophique qui guide votre travail ? Quand je commence une saison, je pars toujours d’idées abstraites, comme en réaction à ce qui a été fait précédemment, car on veut quelque chose de frais et de fort. Puis les choses deviennent plus concrètes et il s’agit de résoudre des problèmes et de rapporter tout cela progressivement à de vrais habits. Il y a toujours une question importante dans ce processus: “Puis-je vraiment imaginer quelqu’un porter cela, ou pourrais-je moi-même le porter?” Au final on ne fait pas des vêtements pour que ce soit beau en photo, mais bien pour que les gens aient l’air beau dans la vraie vie. C’est toute la différence : Il ne s’agit alors pas de faire une déclaration d’intention qui soit conceptuelle, mais plutôt de revenir à l’essence des vêtements ! J’essaye de ne jamais oublier cela.

Pour peu qu’il y en ait, quelles sont les considérations commerciales chez Lanvin ? Comment faites-vous vos choix ? Quels sont vos points forts? Quelles sont vos principales préoccupations techniques pour vos collections ? Il y a énormément de libertés, mais je garde les pieds sur terre et c’est important de savoir ce que l’on vend, cela fait partie du jeu. J’ai appris à me débarrasser des choses qui n’étaient pas importantes. En tant que créateur, on peut s’attacher à certaines pièces car elles ont été difficiles ou pris du temps à faire. On se souvient du travail qu’elles ont nécessité, les problèmes rencontrés pour trouver la bonne solution pour qu’elles fonctionnent. Créer c’est vraiment résoudre des problèmes. Mais au final, il faut savoir prendre du recul, relativiser et garder un oeil extérieur. Parfois on enlève, on retire des pièces qu’on appréciait si elles n’aident pas à raconter l’histoire.

Continuons sur le sujet, je me demande à quel point il est difficile de créer des collections qui rendent compte à la fois de la singularité de la marque et de la tendance actuelle. Avec quelle facilité un créateur peut-il faire des vêtements qui doivent être aimés et chéris ? Je ne réfléchis jamais aux tendances. La mode est affaire d’intuition, je ne me réfère qu’à cela. Il faut rester fidèle à soi-même et à la marque pour laquelle vous travaillez. Il faut avoir en tête l’histoire de la marque et la respecter, tout en restant dans l’air du temps et être cohérent avec le monde dans lequel nous vivons. Voila toute la difficulté: C’est d’avoir la bonne idée au bon moment. Etre en retard ou en avance, c’est courir le risque d’être hors sujet.

La mode des années 90 s’est développée à l’échelle mondiale en même temps qu’internet, avec une multiplication des vêtements modernes et pratiques qui étaient par ailleurs trans-culturels. Comment décririez-vous la scène actuelle ? Chaotique ! C’est comme si tout le monde attendait que les choses changent, dès lors tout prend instantanément une ampleur disproportionnée. Le “hunger fox”, “the new”, sont des concepts inquiétants, la presse joue également un rôle important…Je préfère les choses qui durent, c’est en fait ce qu’il y a de plus difficile dans la mode, de durer!!

Est-ce difficile de parvenir à des solutions fonctionnelles, qui tiennent compte de l’aspect pratique tout en gardant un certain sens du luxe ? Il faut rester en contrôle de ce que vous faites. Savoir pourquoi vous avez pris certaines décisions et pas d’autres. Certaines choses ont un prix et il faut pouvoir le justifier auprès de ses clients. Ils ne mentent jamais! Si une pièce est singulière ils sont souvent prêts à y mettre le prix.

Pourquoi essayons-nous toujours de réinventer les silhouettes ? La mode est faite de couleurs, de matières et de silhouettes. Ce sont les éléments avec lesquelles les créateurs jouent. C’est votre mode d’expression. Pour séduire les gens il faut pouvoir faire évoluer les choses, ils n’achèteront pas la même chose encore et encore. En tant que créateur il nous arrive de détester quelque chose que nous avons adoré auparavant. C’est une évolution naturelle. Le fait que nous nous intéressions autant à la silhouette dans la mode masculine est assez récent, car elle n’avait pas évolué tant que cela par le passé. Aujourd’hui les choses bougent encore plus rapidement et sont plus radicales que jamais auparavant. Chez Lanvin, nous avons toujours joué avec les volumes et les silhouettes. Cela n’a jamais été aussi linéaire; je pense en effet que personne n’est identique et que ce qui fonctionne pour l’un ne fonctionnera pas pour l’autre. Chez Lanvin nous privilégions toujours l’individualité, j’aime cette idée d’avoir le choix.

Pour la plupart des gens, acheter une pièce de chez Lanvin est un investissement. Cela devrait-il en être ainsi; dans quelle mesure vous sentez-vous engagé envers les clients ? De quelle façon ? Je suis très conscient de cela et je suis au courant des prix! Nous faisons beaucoup d’efforts pour que les choses restent abordables, mais nous sommes une marque de luxe avec des critères de qualité élevés. Il y a beaucoup de travail de petites mains, d’artisanat et d’amour mis dans nos vêtements; de la sélection des matières, à la conception de tissus uniques, la fabrication des vêtements et des détails. Je pousse vraiment mes ouvriers à la limite afin de pouvoir aller de l’avant. Tout ce travail à un coût. Mais comme je l’ai mentionné auparavant: nos clients saisissent la différence; s’ils voient qu’une pièce est singulière, ils sont prêts à y mettre le prix. C’est ce qui nous différencie des marques bons marchés. N’oubliez pas que nous venons du sur-mesure !

Y’a t-il un mauvais côté et un bon côté dans ce que vous faites? Jusqu’où votre passion vous entraîne t-elle pour les choses auxquelles vous croyez ? Je suis extrêmement passionné par la création. Je ne sais pas ce que je ferais sinon. Je me réveille la nuit en y pensant, et ça occupe tout mon temps. Si ce n’était pas le cas, pourquoi serais-je devenu créateur? Je m’implique à 100%, c’est la seule façon pour moi. Ce que j’aime dans la mode est aussi c’est que je déteste: l’urgence. Mais cela vous donne la possibilité de réinventer et de tout remettre en question tous les six mois. Ca vous rend assez accro.

Photography Scandebergs
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